Le traitement des contractures en électrothérapie

Pierre Ortigas membre des kinésithérapeutes de la fédération française d’athlètisme

Thierry Verson ingénieur bio-médical, formateur t.verson@free.fr

La contracture est une des pathologies les plus fréquentes chez les sportifs. Elle est souvent contraignante chez les sportifs de haut niveau ou la compétition impose des délais de réparation très courts. Actuellement les dernières techniques d’électrothérapie permettent de résoudre la plupart des contractures en deux jours maximum.

Ces techniques décrites ci-dessous ont été établies sur un appareil à haut voltage à deux générateurs à programmation indépendante; elle se décomposent en quatre stades.

Stade 1: affaiblissement des défenses sensitives:

Etablissement d’un programme d’inhibition sensitive vibratoire associé à une ionisation de Coltramyl (aucune action centrale) sur le muscle contracturé:

- anode + coltramyl sur la contracture

- cathode en position lombo-sacrée

- 2 mA de courant galvanique (électrode 4 x 5 cm)

- courant alternatif superposé

- balayage de fréquence entre 25 et 150 Hz d’une durée de 120 secondes

- largeur d’impulsion choisie à vibration afin de stimuler les fibres de gros diamètre ab sans solliciter le moto-neurone et les fibres de petit diamètre nociceptives. Néanmoins il m’est arrivé de devoir utiliser chez certains patients des largeurs d’impulsion très importantes.

- pente de début de 3 secondes

- temps de plateau de 120 secondes

- pente de fin de 2 secondes

- temps de repos de 1 seconde

- intensité montée jusqu’à la sensation de vibration très forte sur l’anode, sans contraction ni douleur.

 

Nota: l'ingestion préalable de Coltramyl est conseillée sur prescription médicale.

 

Etablissement simultané d’un programme de stimulation du muscle antagoniste suivant les principes de l’innervation croisée de Sherrington.,

programme utilisé sur le 2ème générateur.

- courant alternatif

- balayage de fréquence de 10 à 30 Hz en 5 secondes

- largeur d’impulsion à établir à secousse musculaire forte, choisie pour recruter le moto-neurone sans solliciter les fibres sensitives. La largeur d’impulsion de ce programme est souvent très basse entre 10 et 100 µs, en fonction de la physiologie du patient et du volume du muscle.

- pente de début de 1 seconde

- temps de plateau de 3 secondes

- pente de fin de 1 seconde

- temps de repos de 15 secondes

Sur l’antagoniste, je préfère utiliser ce type de programme car il ne sollicite pas les fibres rapides contracturables et économise ce muscle qui sera souvent sollicité pendant le traitement.

 Variante: choix d'une fréquence fixe entre 20 et 60 Hz

 

Etablissement simultané d’un programme de myo-relaxation de l'agoniste contracturé

programme utilisé sur le 2ème générateur.

- courant alternatif

- fréquence constante de 3 Hz

- largeur d’impulsion à établir à secousse musculaire nette, choisie pour recruter le moto-neurone sans solliciter les fibres sensitives

- pente de début de 1 seconde

- temps de plateau de 30 secondes

- pente de fin de 1 seconde

- temps de repos de 5 secondes

- durée 30 minutes

 

Stade 2: affaiblissement de la défense motrice

Un muscle en posture d'étirement qui reçoit des impulsions électriques se raccourcit sans que ses insertions se déplacent; en conséquence, il se détend au repos.

Etablissement d’un programme myo-relaxant sur le muscle contracturé:

muscle en position d’étirement

- courant alternatif

- fréquence 3 Hz

- largeur d’impulsion à secousse musculaire nette, choisie de manière à ne pas solliciter les fibres sensitives.

- pente de début de 2 secondes

- temps de plateau de 30 secondes

- pente de fin de 2 secondes

- temps de repos de 5 secondes

- durée de 15 minutes

 

Etablissement simultané d’un programme de stimulation concentrique sur le muscle antagoniste (2ème générateur)

- courant alternatif

- fréquence 60 Hz

- largeur d’impulsion à contraction visible sans solliciter les fibres sensitives.

Nota: chaque patient nécessite de déterminer la largeur d’impulsion qui lui est propre pour obtenir la contraction la plus franche et la plus confortable. Ce paramètre est systématiquement individuel et connait des variations très importantes en fonction des conditions d’utilisation et de la physiologie du patient.

- pente de début de 2 secondes

- temps de plateau de 1 seconde

- pente de fin de 2 secondes

- temps de repos de 10 secondes

- durée de 15 minutes

 

Stade 3: électro-stretching

Etablissement d’un programme d'électro-étirement sur le muscle contracturé

muscle en position d’étirement jusqu’à ce que le patient sente la contracture

- courant alternatif

- fréquence 3 Hz

- largeur d’impulsion à secousse musculaire nette, choisie de manière à ne pas solliciter les fibres sensitives.

- pente de début de 3 secondes

- temps de plateau de 26 secondes

- pente de fin de 1 seconde

- temps de repos de 60 secondes

- durée de 10 minutes

Le patient corrige sa position au fur et à mesure de manière à garder une tension dans le muscle étiré. Il ne fait aucune autre action, laissant le courant agir. Ce protocole permet d’éviter toute contracture réflexe ou élongation due à un stretching mal dosé.

 

Etablissement simultané d’un programme de stimulation concentrique sur le muscle antagoniste (2ème générateur)

Utiliser les mêmes paramètres qu’au précédent stade.

Faire attention à ne pas fatiguer exagérément le muscle antagoniste (contracture de fatigue). Pour celà changer éventuellement de place les électrodes quand la taille du muscle le permet, et augmenter le temps de repos.

Nota: les programmes à fréquence 60 Hz ne doivent pas être utilisés dans les 36 heures précédant la compétition, sur les muscles qui seront sollicités (économie du glycogène). Ils seront remplacés dans ce cas par le programme de stimulation du stade 1.

 

 

Stade 4: rupture forcée de la contracture

Ce dernier stade est rarement atteint, car dans la plupart des cas, les précédents programmes ont aboli la contracture, le plus souvent en deux jours et souvent en une seule journée à deux séances. Ce denier stade est à utiliser avec l’accord du médecin, de l’entaineur et du sportif, juste avant la compétition. Cette manœuvre est délicate, car si la contracture ne cède pas immédiatement et définitivement, on risque en retour une aggravation réflexe de la pathologie qui nécessitera plusieurs jours pour céder. C’est la manœuvre de la dernière chance.

Etablissement du programme de stimulation du réflexe myotatique inversé

- courant alternatif

- fréquence 60 Hz

- largeur d’impulsion à contraction suffisante pour entraîner le mouvement.

C’est le choix de la juste largeur d’impulsion qui conditionne souvent la réussite ou l’échec de ce traitement

- pente de début de 3 secondes

- temps de plateau de 10 secondes

- pente de fin de 1 seconde

  • temps de repos de 60 secondes

- durée de 10 minutes

Le patient associe une contraction volontaire à la stimulation électrique. Arrivé au bout du mouvement (pente de début), le thérapeute étire le muscle pendant le temps de plateau, le patient résistant à l’étirement. Avant le départ de la stimulation suivante, le patient exercera une contraction contre résistance du muscle contracturé pendant 6 secondes.

 

Principe du réflexe myotatique inversé: un muscle qui ne peut résister à un étirement malgré l'utilisation de toute sa force, abolit complètement son tonus pour se protéger. ce réflexe est initié par la fibre Ib.

 

Physiothérapies associées:

Un échauffement préalable à l’électrothérapie par radar ou ondes courtes sera toujours profitable à tous les stades

Conclusion:

L’idéal est d’utiliser successivement chacun des trois premiers stades dans la même séance et de se servir du quatrième stade exclusivement en dernier ressort.

A condition de prendre la peine d’adapter correctement les largeurs d’impulsion , et de travailler sur la physiologie du sportif, l’électrothérapie se révèle un outil extraordinaire dans le traitement des contractures.