Les bases physiologiques de l'électrothérapie
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L'électrothérapie représente depuis
longtemps un outil de "thérapie occupationnelle" pour des praticiens
non formés et n'ayant pas la connaissance de ses possibilités. En fait
l'électrothérapie est un outil extraordinaire au service de celui qui en domine
les lois et
Stratégie thérapeutique
La plupart des pathologies nécessitent un traitement sensitif
(antalgique), et un traitement moteur (renforcement et/ou étirement). Il faut
donc prioritairement se demander ce que doit apporter l'électrothérapie dans
une stratégie globale, pourquoi et comment l'employer. En général, le rôle de
l'électrothérapie sera de diminuer la douleur, la spasticité éventuelle, permettre
un renforcement musculaire ou/et un étirement puissant et rapide, lever les
contractures... Ainsi le praticien, pourra plus facilement et plus rapidement
mobiliser, enchaîner un travail actif, reprogrammer la fonction défaillante.
Nous verrons plus loin des applications précises de l'électrothérapie.
Exemples de stratégie
Lombo-sciatique:
Ce schéma n'est pas exhaustif et dépend pour
beaucoup du bilan réalisé et de l'approche du praticien. Il représente
néanmoins un exemple de plan dans lequel le praticien choisit l'importance
qu'il donne à l'électrothérapie et les effets qu'il veut en obtenir. Dans ce
cas on pourrait attribuer à
l'électrothérapie le travail de myo-relaxation, de détente psychique, de
renforcement musculaire et d'électro-étirement des ischios-jambiers. Il
apparaît dans ce plan que l'électrothérapie est un outil et qu'elle doit être
associée à toute autre technique que le praticien domine, pharmacologie,
mobilisations, réflexothérapie, ostéopathie, travail en chaînes musculaires,
techniques de Mezières, de Sohier etc…Il apparaît difficile de soutenir la
thèse de l'efficacité parfaite d'une seule technique contre l'association de
plusieurs techniques parfaitement maitrisées; il est plus probable que l'idéal
pour le patient serait d'être pris en charge par une équipe pluri-disciplinaire
où chaque praticien est spécialisé dans son domaine.
Entorse du LLE de la cheville
Dans ce cas on peut attribuer à
l'électrothérapie le rôle antalgique, la stimulation des péroniers, l'action
anti-œdémateuse. Encore une fois ce schéma n'a pas la prétention d'être
exhaustif et n'est qu'un exemple modifiable en fonction du bilan et de
l'approche du praticien.
Hémiplégie
Dans le cas de l'hémiplégie, si
l'électrothérapie est un outil de premier plan, la limite sera malheureusement
trop souvent le temps à consacrer au patient qui ne permettra pas un réel
travail de reprogrammation.
L'antalgie
Le traitement local de la
douleur par inhibition des signaux nociceptifs
On connaît l'action antalgique des cations (+) et
celle produite par l'hyperpolarisation (diminution de la conduction nerveuse
des fibres nociceptives) obtenue sous l'anode par un courant polarisé. On
connaît également l'action anti-œdémateuse de l'anode.
Courant
impulsionnel unidirectionnel
On utilisera donc un courant polarisé
(courant galvanique ou courant impulsionnel polarisé) associé à un produit
ionisable antalgique sur l'anode (électrode +) qu'on positionnera sur la
douleur ou l'œdème. Du fait de la ionisation, le temps minimum de traitement
sera de 30 mn.
De Bishopp et Dumoulin ayant mis en évidence
la diminution du tonus postural (anaélectro-tonus) obtenu par un courant
polarisé dont l'anode est placée en amont sur le schéma nerveux périphérique, on
positionnera l'anode sur la douleur et la cathode en aval (par exemple dans le
traitement de l'entorse du LLE de la cheville, on placera l'anode sur le LLE et
la cathode sous la voûte plantaire ou en position lombo-sacrée).
La cathode sera surdimentionnée pour diminuer son
effet excitant. L'action anti-inflammatoire des anions sera assurée par la voie
sanguine.
Un
courant polarisé produisant des substances chimiques ( acides à l'anode et
bases à la cathode), on prendra la précaution d'utiliser des éponges pour
absorber ces résidus.
Traitement par
inhibition sensitive vibratoire (ISV) et ionisation de l'entorse du LLE
Travail de récupération
de l'amplitude articulaire sous un courant inhibiteur
L'antalgie locale par
excitation des fibres augmentant la filtration des signaux nociceptifs
On connaît également grâce notamment à
Melzack et Wall, le principe de la théorie du portillon ou Gate Control System.
Par la stimulation locale des fibres antalgiques ab (réparties
sur toute la surface du corps), on obtient une augmentation de la filtration
des influx nociceptifs au niveau de la corne postérieure de la moelle épinière.
La question se pose donc des paramètres à utiliser pour obtenir cet
effet qui se caractérise par une sensation de vibration. Les chercheurs ont
déterminé une gamme entre 15 Hz (impulsions) et 150 Hz pour recruter les fibres
ab
. Il suffit ensuite d'un peu d'expérience pour obtenir cette vibration par une
balance entre la largeur d'impulsion et l'intensité. Le schéma des courbes de
Howson est un exemple: l'ordre de recrutement des fibres est identique chez
tous les sujets, mais les valeurs de largeur d'impulsion et d'intensité sont
strictement individuelles et dépendent pour beaucoup de la puissance délivrée
par l'appareil.
Physiologie des
différentes fibres sensitives
Les courbes de Howson
On superposera donc au 1er courant galvanique,
un courant alternatif avec une intensité et une largeur d'impulsion moyennes à
une fréquence entre 25 Hz (moins désagréable que 15 Hz) et 150 Hz. Les temps de
travail seront longs et les temps de repos courts de manière à ce que perdure
cette vibration.
Courant alternatif (bidirectionnel)
Nota: Un effet antalgique peut aussi être
obtenu par application d'une ISV sur la zone contro-latérale, ou par
stimulation de points de réflexothérapie.
Le traitement
rachidien de la douleur par stimulation des neuromédiateurs et des mécanismes
supra-segmentaires
On connaît aussi un autre mécanisme
antalgique: la production de neuro-médiateurs, obtenue par stimulation
paravertébrale. Ces neuro-médiateurs (enképhalines, endorphines, opioïdes…) se
fixent sur des récepteurs spécialisés dans le cerveau et affaiblissent la
perception douloureuse. De plus ces substances produisent un effet de
relaxation générale, souvent souhaité dans le traitement des pathologies. Les
recherches ont mis en évidence la production de ces substances par
l'application d'un courant de fréquence entre 1 et 10 Hz et d'intensité "à
sensation" sur différentes zones dont la plus pratique d'application est
le rachis.
Nota: Les mécanismes obtenus à partir de la
stimulation rachidienne ne sont pas tous clairement expliqués, du fait de la
difficulté à déterminer quelles sont les fibres réellement stimulées et dans
quel schéma elles s'inscrivent.
En conséquence, on appliquera un courant
alternatif de fréquence entre 1 et 10 Hz, à sensation, sur des électrodes
longues situées en paravertébral.
Il est connu que l'effet moteur
décontracturant (contracté-relâché) est obtenu autour d'une fréquence
principale de 3 Hz avec une intensité réglée "à secousse musculaire".
Donc si on veut profiter de ce montage
pour ajouter un effet moteur décontracturant et relaxant sur les muscles
paravertébraux et sur le myotome, on choisira une gamme de fréquence plus basse
entre 1 et 5 Hz qui permet de coupler les deux effets. De manière à éliminer le
recrutement des fibres sensitives (voir les courbes de Howson), on utilisera
l'intensité maximum et on réglera progressivement la largeur d'impulsion
jusqu'à obtenir les secousses musculaires souhaitées. Pour un meilleur agrément
les temps de repos seront très courts; le temps de la séance tiendra entre 30
et 45 mn.
Stimulation enképhalinergique
cérébrale sur un patient en position de relaxation
L'application simultanée du programme
ISV local et du programme rachidien de traitement de la douleur permet une
potentialisation des effets antalgiques de loin supérieure à l'application
consécutive des deux programmes.
Traitement actif d'une
lombalgie par un 1er programme d'inhibition sensitive vibratoire +
ionisation et un 2ème programme de stimulation enképhalinergique et
décontracturant pour étirer les muscles paravertébraux.
Traitement d'une
tendinite: 1er programme ISV + ionisation avec anode sur la douleur
et cathode dorsale . 2ème programme: stimulation enképhalinergique
cervicale
Traitement d'une main hyperalgique.
1er programme ISV + ionisation avec anode dans la main et cathodes
sous les pieds. 2ème programme: stimulation enképhalinergique
Les effets
moteurs de l'électrothérapie
Technique de la stimulation
motrice à haut voltage
En se reportant au schéma représentant les courbes de Howson, on
s'aperçoit que le meilleur moyen de recruter le motoneurone a en évitant le
recrutement des fibres sensitives nociceptives est de travailler à intensité
maximum en augmentant progressivement la largeur d'impulsion jusqu'à obtention
de l'effet moteur recherché.
Les différences physiologiques entre chaque
individu, les différences des paramètres externes de chaque séance
(température, hygrométrie, état des électrodes) et les variations
physiologiques individuelles (résistivité notamment) rendent illusoires,
inadaptés et donc d'une efficacité aléatoire des programmes automatiques où les
paramètres sont déjà prétendument réglés.
Les effets myo-relaxants
Le traitement des contractures est basé sur
quatre programmes physiologiques principaux:
- le contracter-relâcher:
par un courant alternatif de fréquence 3 Hz
(principale fréquence myo-relaxante), intensité au maximum et largeur
d'impulsion réglée "à secousses musculaires", muscle alternativement
en position de repos et en position d'étirement, pendant 15 minutes.
- la stimulation de
l'inhibition réciproque (Sherrington):
par un courant alternatif de renforcement musculaire à 60 Hz (fréquence
où sont recrutées pratiquement tous les types de fibres motrices) sur le muscle
antagoniste du muscle contracturé pendant 10 minutes avec 1 à 2 secondes de
stimulation importante associée à une contraction volontaire et un temps de
repos de 3 à 5 secondes.
Le principe de Sherrington démontre que la stimulation d'un muscle
inhibe son antagoniste et vice-versa.
Nota: Il est important de veiller à ne pas
fatiguer l'antagoniste stimulé au point de provoquer une contracture.
Traitement d'une contracture
d'un adducteur. 1er programme 3 Hz sur l'adducteur. 2ème
programme de stimulation 60 Hz sur le moyen fessier. Association d'un léger
étirement manuel et progressif de la part du patient.
- le programme d'électro-stretching:
basé sur le contracter-relâcher du muscle contracturé en position
étirée. Ainsi les insertions musculaires ne pouvant se rapprocher, la
contraction des fibres permet en fait leur relâchement au repos. Cet effet
s'obtient par un courant alternatif de 3 Hz sur le corps musculaire pendant 30
s suivi d'un repos de 30 à 60 s, la largeur d'impulsion étant établie "à
secousses musculaires" suivant le principe de la stimulation à haut
voltage définie plus haut.
Ce type d'étirement par electrothérapie
possède l'énorme avantage d'éliminer tout risque de contracture réflexe ou
d'élongation.
Electro-stretching du
droit antérieur
- la stimulation du réflexe
myotatique inversé:
obtenue par application d'un programme de renforcement musculaire
dynamique (60 Hz) avec contraction volontaire associée du muscle contracturé
pendant que dans le même temps le praticien l'étire progressivement. Le réflexe
myotatique inversé est le principe suivant lequel un muscle qui ne peut
s'opposer à son étirement se relâche complètement pour ne pas se rompre.
Stimulation excentrique
sur une tendinite du long biceps pour obtenir une myo-relaxation totale du
muscle.
Association des programmes
sensitifs et moteurs
Une autre possibilité très intéressante de l'électrothérapie dans le
traitement des contractures est d'associer les deux types de programmes
sensitifs et moteurs. On applique sur la contracture un programme d'inhibition
sensitive vibratoire (traitement local de la douleur) et sur le corps
musculaire, si possible de part et d'autre de la contracture, on applique un
programme myo-relaxant de fréquence 3 Hz.
Traitement d'une
contracture d'un ischio-jambier par un 1er programme ISV sur le
muscle contracturé et un 2ème programme myo-relaxant 3 Hz de part et
d'autre de la contracture.
Le renforcement musculaire
Choix de la fréquence
On connaît les fréquences de recrutement des
différentes fibres motrices, puisque la fréquence de tétanisation adéquate
dépend du cycle de contraction + décontraction de la fibre, soit 20 à 30 Hz
pour les fibres lentes, 30 à 50 Hz pour les fibres intermédiaires et de 50 à
100 Hz pour les fibres rapides. L'erreur classique consiste à croire qu'on peut
isoler les fibres rapides en travaillant avec une fréquence de 100 Hz. En fait
en générant 100 impulsions on génère les 20 nécessaires à la stimulation des
fibres lentes. A 100 Hz on sollicite donc tous les types de fibres. Le
recrutement isolé des fibres rapides dépend donc des temps de repos appliqués.
Des temps de repos de l'ordre de la demi-seconde privent les fibres lentes
d'oxygène et permettent d'isoler les fibres rapides dont le métabolisme est
anaérobique (sans oxygène).
En règle générale, il n'appartient pas au
kinésithérapeute de changer la répartition des types de fibres, et le plus
souvent on travaillera l'ensemble du potentiel musculaire à une fréquence entre
60 et 100 Hz.
Mode de stimulation
Il a été décrit plus haut la technique se
stimulation par le plus haut voltage (intensité) disponible, pour éliminer le
recrutement des fibres sensitives et notamment des fibres nociceptives en
augmentant progressivement la largeur d'impulsion.
On distingue trois programmes principaux de
renforcement musculaire:
- le programme de réveil
moteur:
permet par des salves d'impulsions à
fréquences basses et progressivement croissantes de 1 à 20 Hz de redonner à des
fibres sidérées leur autonomie de contraction.
- le programme de
renforcement musculaire isométrique ou gymnastique passive:
est surtout destiné à lutter contre l'amyotrophie de muscles de membres
immobilisés. Il a pour désavantage d'augmenter la force exclusivement sur le
degré articulaire de travail.
- le programme de
renforcement musculaire dynamique:
doit être associé à une contraction volontaire du patient. Afin de
recruter le maximum de fibres motrices en évitant de solliciter les fibres
sensitives, il faut appliquer une résistance correspondant à la force
développée.
Utilisation d'une sangle
élastique type thera-band dans le renforcement musculaire des quadriceps
Le recrutement progressif des fibres de
manière indolore s'obtient en montant progressivement la largeur d'impulsion,
intensité au maximum, tout en augmentant parallèlement la résistance appliquée.
Les techniques d'électro-musculation sont basées sur la stimulation du
fuseau neuro-musculaire qui permet un recutement maximal réflexe des fibres
motrices a .
Succintement, le fuseau neuro-musculaire est sollicité lors de
l'étirement du muscle; il réagit à cet étirement par une excitation de la fibre
sensitive 1a qui communique au niveau rachidien avec le motoneurone a , générant
ainsi la stimulation de nouvelles unités motrices destinées à contrer
l'étirement. L'électrothérapie de haut voltage permet de recruter
Cette procédure permet de développer dès la première séance un meilleur
recrutement lors de la contraction; elle permet également de développer une
force double de la force volontaire maximale chez un individu moyen, et un gain
de force de près de 10% sur trois séances par amélioration du recrutement des
unités motrices.
Les mécanismes hypertrophiques sont mis en
jeu ultérieurement.
Exemples divers
Electro-étirement
du psoas
Traitement contre la
spasticité
manipulation sous
électrothérapie ( ISV)
traitement d'une
pubalgie par un 1er programme de renforcement abdominal et un 2ème
programme d'électro-stretching des adducteurs
.
reprogrammation motrice globale et segmentaire chez un sujet
hémiplégique
Récupération de
l'amplitude articulaire
Pédiatrie
Utilisation en
lymphologie
Utilisation des
techniques d'inhibition du tonus musculaire avec une suspension
Electro-stretching des
jumeaux
Algoneuro-dystrophie réflexe
Application de l'électrothérapie pour lutter contre les
rétractions musculaires et tendineuses chez un patient comateux en phase de
réveil
Electro-musculation
Application des nouvelles techniques d'électrothérapie en
esthétique
Ce court exposé ne peut représenter toutes les possibilités de
l'électrothérapie, mais doit aider à comprendre les principaux mécanismes de
l'électrothérapie et à appréhender tout le bénéfice que peut en tirer un
praticien soucieux du meilleur
Pour obtenir le CD ROM de formation comprenant les exemples
thérapeutiques commentés, contacter l'auteur par mail: t.verson@infonie.fr